Certains disent que les compléments de phytothérapie et le coronavirus ne font pas bon ménage, alors que d’autres parlent déjà de contre-indications. Nous faisons le point sur les précautions à prendre avec les plantes en cas d’infection au Covid.
Le 31 mars, en plein confinement, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) s’est autosaisie pour réaliser une expertise. Le but ? Évaluer les risques liés à la consommation de compléments alimentaires contenant des anti-inflammatoires végétaux et des plantes immunomodulatrices.
Pourquoi cet intérêt en pleine pandémie ?
Dès le début de l’épidémie en France, les autorités sanitaires ont constaté des « événements indésirables graves » chez certains sujets atteints ou suspectés d’être atteints du coronavirus. Il s’est avéré que ces complications étaient consécutives à l’utilisation de médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (les fameux AINS).
Et, en cas d’inflammation, il y a d’autres recours possibles que les médicaments. Le regard de l’ANSES s’est donc naturellement tourné vers les compléments alimentaires. Il fallait les étudier dans le contexte de l’infection par le SARS-Cov-2.
L’ANSES a en effet estimé important :
- d’alerter les consommateurs qui prennent des compléments à base de plantes réputées anti-inflammatoires sans forcément en avoir conscience ;
- d’éviter un repli sur ces compléments alimentaires disponibles à l’achat sans ordonnance, à la différence des AINS.
Un comité d’experts a donc analysé les risques avant de rendre ses conclusions.
Un avis de précaution depuis le 10 avril 2020
Afin de prévenir tout risque de complications infectieuses, l’avis de l’ANSES n°2020-SA-0045 préconise de proscrire la prise de plantes immunomodulatrices et d’anti-inflammatoires végétaux en cas d’apparition de symptômes évocateurs du coronavirus. Leurs propriétés risqueraient en effet d’interférer avec la réponse immunitaire ou inflammatoire de l’organisme.
Le pouvoir des plantes
Les plantes anti-inflammatoires
L’analyse de l’ANSES met en lumière l’acide salicylique, un composé naturel connu de tous. C’est en effet lui qui a donné naissance à l’aspirine (acide acétylsalicylique), « le plus célèbre des AINS ». Présente dans le saule, la reine des prés, le bouleau et le peuplier, cette substance fait de ces plantes des anti-inflammatoires végétaux (AIV).
L’ANSES évoque par ailleurs les potentialités anti-inflammatoires de certaines plantes :
- la réglisse et sa glycyrrhizine (déjà contre-indiqué en cas d’hypertension ou de traitement hypokaliémiant) ;
- l’harpagophytum et son harpagoside ;
- le boswellia et ses acides boswelliques ;
- le commiphora et ses guggulstérones ;
- le curcuma et sa curcumine ;
- et aussi le bouillon blanc, la scrofulaire chinoise, les véroniques et les bugles.
En résumé, ces plantes montrent un risque de perturbation de la réponse inflammatoire et donc immunitaire et présentent ainsi des contre-indications dans le cadre infectieux du Covid.
Les plantes immunomodulatrices
La réponse immunitaire ne s’illustre pas que par une inflammation. Et certaines plantes semblent capables de moduler ou de stimuler l’immunité cellulaire.
2 d’entre elles ont été citées par l’ANSES : l’échinacée, déjà pas mal étudiée, et la griffe du chat (uncaria tomentosa). La première doit son pouvoir à sa richesse en polysaccharides capables d’augmenter la phagocytose et de stimuler l’activité des lymphocytes NK. L’autre le doit à sa richesse en alcaloïdes (de type pentacyclo-oxindolique). Ils stimuleraient la phagocytose des polynucléaires neutrophiles et des macrophages et induirait l’expression des interleukines 1 et 6 (IL-1 et IL-6).
Les compléments à base d’échinacée et uncaria tomentosa sont particulièrement à éviter si vous pensez avoir contracté la Covid-19. En effet, en plus de leurs propriétés immunomodulatrices, elles exercent également une activité anti-inflammatoire.
Précaution : un principe fondamental en santé publique
Il reste encore beaucoup d’inconnues autour de la Covid-19. Et aussi autour des plantes. Les répercussions de leurs effets en cas d’infection virale ne sont pas connues et leur étude prendra encore du temps. On peut comprendre aisément que la priorité va au traitement et au vaccin.
Nous devons donc raison garder et continuer d’appliquer les bons réflexes en termes de complément alimentaire :
- respecter les recommandations des fabricants (cela implique de lire même les petites lignes) ;
- demander l’aval de son médecin en cas de traitement quel qu’il soit.
De la même façon qu’elle l’avait fait pour les compléments alimentaires à visée articulaire, l’ANSES fait une nouvelle fois preuve de vigilance pour la santé du plus grand nombre. Et on ne peut que s’en réjouir.